Devenir manager constitue souvent une étape clé dans une carrière professionnelle. Pourtant, derrière la promotion et les félicitations, de nombreux cadres ressentent un sentiment insidieux : le syndrome de l’imposteur. En effet, ils ont l’impression de ne pas mériter leur place, d’avoir trompé les autres sur leurs compétences et de risquer d’être bientôt démasqués. Ainsi, pour les futurs managers, cette sensation peut freiner la prise de poste. Mais alors, pourquoi apparaît-elle ? Et surtout, comment la dépasser ?
Qu’est-ce que le syndrome de l’imposteur ?
Pauline Clance et Suzanne Imes ont conceptualisé le syndrome de l’imposteur dans les années 1970. Il se manifeste avant tout par un doute constant sur ses compétences, une peur de l’échec et la conviction d’avoir réussi par chance plutôt que par mérite.
Un futur manager ressent souvent ce syndrome parce que la pression du rôle amplifie ce sentiment. En effet, passer d’expert à leader impose de nouvelles responsabilités : gérer une équipe, prendre des décisions stratégiques et fédérer des collaborateurs. Par conséquent, ces changements bouleversent les repères et déclenchent un sentiment de vulnérabilité.
De plus, l’environnement professionnel accentue également ce malaise. Dans des entreprises qui valorisent la performance et la compétence, reconnaître un manque de confiance devient particulièrement difficile. Ainsi, au lieu d’exprimer ses craintes, le futur manager les enfouit, ce qui augmente considérablement son stress et son isolement.
En résumé, le syndrome de l’imposteur ne révèle pas un manque de compétences réelles ; il traduit avant tout une distorsion cognitive. La personne interprète ses succès comme des erreurs de jugement des autres ou des coups de chance, jamais comme le fruit de son travail.
Pourquoi touche-t-il particulièrement les futurs managers ?
Tout d’abord, la prise de poste managérial crée une véritable rupture identitaire. Jusqu’à présent, le professionnel se définissait essentiellement par son expertise technique. Soudain, il doit mobiliser des compétences relationnelles et stratégiques. Cette transition génère logiquement un sentiment d’illégitimité : « Suis-je capable de guider des personnes plus expérimentées que moi ? »
Ensuite, les futurs managers subissent une injonction paradoxale : ils doivent être immédiatement performants tout en apprenant un nouveau métier. Par conséquent, cette pression renforce l’autocritique. Chaque erreur devient ainsi la preuve qu’ils « ne sont pas faits pour ça ».
Enfin, la comparaison sociale amplifie ce phénomène. L’essor des réseaux professionnels facilite la comparaison avec des managers aguerris, ce qui accentue encore l’impression de décalage. Or, il faut souligner que la comparaison hors contexte nourrit fortement le doute.
En somme, le syndrome de l’imposteur ne résulte pas uniquement d’une fragilité personnelle ; il découle également d’un environnement exigeant et de croyances collectives sur ce qu’est « un bon manager ».
Les conséquences sur la posture managériale
Quand un futur manager sous-estime ses compétences, il adopte souvent une posture défensive. Ainsi, il évite de prendre des décisions, délègue excessivement ou, à l’inverse, contrôle tout pour masquer ses doutes. Ces comportements fragilisent inévitablement la relation avec l’équipe.
De plus, la peur du jugement limite aussi la communication. Le manager hésite à demander de l’aide, à exprimer ses incertitudes ou à partager ses difficultés. Paradoxalement, cette attitude alimente la solitude et augmente le stress.
Le syndrome de l’imposteur freine également le développement de compétences clés : donner du feedback, motiver ou innover. Lorsque toute l’énergie sert à « ne pas être démasqué », il reste très peu de place pour la créativité et la vision stratégique.
Enfin, sur le plan personnel, les conséquences se révèlent lourdes : anxiété, troubles du sommeil, voire épuisement professionnel. Ce cercle vicieux peut donc mener à un désengagement progressif, voire à une remise en question de la carrière managériale.
Comment identifier les signaux ?
Plusieurs indices doivent alerter :
✅ Vous minimisez vos réussites en les attribuant à la chance ou au hasard.
✅ Vous recherchez en permanence la validation externe pour vous rassurer.
✅ Vous avez une peur excessive de l’échec qui vous pousse à surinvestir ou à procrastiner.
✅ Vous refusez les compliments sans justification (« C’est rien, j’ai juste eu de la chance »).
Ces signaux ne doivent surtout pas passer inaperçus. En effet, les reconnaître constitue déjà une étape essentielle pour s’en libérer.
Stratégies pour dépasser le syndrome de l’imposteur
1. Changez votre dialogue intérieur
Les pensées automatiques négatives entretiennent le doute. Apprenez donc à les identifier et à les reformuler. Par exemple, remplacez « Je ne suis pas à la hauteur » par « Je suis en phase d’apprentissage, et c’est normal ».
2. Appuyez-vous sur les faits
Listez vos réussites, vos compétences et les feedbacks positifs que vous recevez. Cette démarche vous aide à contrer la distorsion cognitive. Tenez aussi un journal de vos succès pour adopter une vision plus réaliste de vos capacités.
3. Osez la transparence
Partagez vos craintes avec un mentor, un coach ou un pair. Ces échanges dédramatisent la situation et rappellent que le doute touche tout le monde.
4. Recherchez la formation continue
Apprenez le management. En effet, suivre des formations sur le leadership, la communication ou la gestion des conflits renforce votre légitimité perçue et réelle.
5. Pratiquez l’auto-compassion
Acceptez de ne pas tout savoir, reconnaissez vos efforts et donnez-vous le droit à l’erreur. Ces gestes constituent des antidotes puissants à la culpabilité.
Le rôle des entreprises pour prévenir le syndrome de l’imposteur
Les entreprises doivent agir rapidement. Trop souvent, elles nomment des managers sans accompagnement, croyant qu’ils apprendront « sur le tas ». Pourtant, la transition managériale représente une phase critique qui demande un soutien structuré.
Ainsi, mettez en place des programmes de mentorat, proposez un coaching individuel et créez des communautés de managers. Ces dispositifs favorisent la montée en compétence et réduisent l’isolement. De plus, valorisez la culture du feedback et normalisez le droit à l’erreur pour instaurer un climat psychologiquement sécurisant.
Prévenir le syndrome de l’imposteur ne relève donc pas seulement de la responsabilité individuelle. Il s’agit aussi d’un enjeu collectif qui conditionne la performance et l’engagement des équipes.
Et si le doute devenait une force ?
Le syndrome de l’imposteur, bien que douloureux, peut devenir une opportunité de croissance. En réalité, il révèle souvent un haut niveau d’exigence et de conscience professionnelle. En l’apprivoisant, le futur manager développe humilité, écoute et capacité d’adaptation : trois qualités précieuses pour un leader.
Alors, ne subissez plus ce sentiment. Utilisez-le plutôt comme un levier pour progresser. Car au fond, un bon manager ne se définit pas par l’absence de doute, mais par la capacité à transformer ses doutes en actions concrètes.
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